SHIVERS de David Cronenberg

Publié le par LESTAT

Frissons
(Shivers)
Réalisé par David Cronenberg

ScénarioDavid CronenbergSociété de production DAL ProductionsCoproduction CFDC - Canadian Film Development CorporationProducteurIvan ReitmanProducteurJohn DunningProducteur André LinkCoproducteur Don CarmodyProducteur exécutif Alfred PariserDistributeur d'origine SND - Société Nouvelle de DistributionDirecteur de la photographie Robert SaadIngénieur du son Danny GoldbergMaquilleur Joe BlascoMonteur Patrick Dodd
Avec Paul Hampton, Joe Silver, Lynn Lowry, Allan Kolman, Susan Petrie, Barbara Steele...

Canada - 87 mn – 1975

 

 

 

Premier long métrage de David Cronenberg qui, après deux courts métrages (Stéréo et Crimes of the future) s’attaque d'emblée aux thèmes qui allaient devenir récurrents dans sa filmographie : le sexe et la violence.

Et le cinéaste choisit de nous conter une histoire de parasites qui causent des orgies sexuelles!

Le thème de la maladie inconnu qui se propage à vitesse grand V a souvent été traité, que se soit dans le domaine du cinéma ou de la littérature. Mais qui mieux que Cronenberg pouvait nous donner une vision original et horrifique, lui qui développera le même leitmotiv dans la majorité de sa filmographie : celui de la chair et de sa mutation.

Pour son premier champ d’expérience, Cronenberg situe l’action dans un lieu isolé du reste de la ville. Les premiers plans sont une suite d’images d’un complexe touristique moderne de grand luxe. Une voix off nous présente les lieux façon « brochure de vacance » avec ses chambres équipées, son terrain de golf, sa piscine olympique etc.. L’immeuble ultramoderne qui nous est exposé par cette fameuse voix-off n’est autre que la société elle-même et son désir d’émancipation qui l’accompagne.

Les résidents de ce lieu de culte du matérialisme semblent souffrir d’un manque affectif chacun à leur manière. Ainsi la femme d’un des locataires, Eric, est complètement délaissé par celui-ci qui préfère s’extasier sur les bestioles qui logent dans son ventre. De même que cette pauvre infirmière qui malgré tous ses efforts de séduction laisse le Dr saint luc complètement de marbre. 

Il faudra donc un choc physique ou  un traumatisme pour libérer ses corps du carcan environnemental et s’épanouir pleinement, ou plutôt sexuellement.

 

On entre alors dans la phase « surnaturel » de tout film fantastique et d’horreur. On apprend qu’une multinational finance les expériences d’un « savant fou » concernant la création d’un parasite capable de remplacer un organe humain défectueux. Le superbe complexe touristique devient alors champs d’expérimentation et ses résidents d’éventuels cobayes.

 

Le résultat de ses expériences est  montré de façon violente des le début du film. Trois séquences sont monté en parallèle avec la visite d’un couple ignorant le danger qui se trame,   le meurtre sauvage d’une jeune fille par le médecin responsable de la contamination. Tel le Dr Frankenstein, sa création lui échappe et décide de l’anéantir sur le champ ; Malheureusement, la jeune cobaye qu’il s’est choisi est une nymphomane qui a déjà contaminé pas mal d’hommes dans l’immeuble.

La troisième séquence est celle d’Eric, premier vrai contaminé. Il n’est plus maître de son corps et passera la majeur partie du film à vomir des parasites. Il n’a pas l’air effrayé de ce qui lui arrive et se prend même d’affection pour ses créatures qui logent en lui. Tel une mère porteuse, il ira jusqu’au meurtre pour protéger ses « enfants ».

 

La maladie se propage rapidement, les résidents contaminé par le parasite ( qui ressemble à un penis ) subissent une véritable fièvre du viol.  Il ne s’agit pas de morts physiques mais une annihilation de la personnalité et une exacerbation des pulsions sexuel qui devienne le dominant. On apprendra plus tard que le parasite est le mélange savant d’aphrodisiaques et d’une bactérie vénérienne. Ainsi naît une nouvelle maladie qui se transmet essentiellement par le truchement des relations sexuelles (comme le sida), qui « transformera le monde en une magnifique orgie ».

Nous somme au milieu des années soixante dix et la libération sexuelle n’et pas loin. Toutes l action du film n’est que le reflet exacerbé de la réalité en vigueur à cette époque. Cronenberg utilise la parasite afin de justifier les mœurs jusqu'à présent tabou des résidents comme l’homosexualité, l’inceste, le sadomasochisme, les orgies, l’humiliation etc. Des visions extrêmement dérangeantes de ces bêtes nymphomanes qui provoquent chez le spectateur autant d’angoisse que d’excitation. C’est le retour à la barbarie des origines, celle dont notre société moderne croyait avoir à jamais triomphé. Il y a alors un decalage entre le lieux, symbole du modernisme dernier cri et les residents. De statut de gens aisés et eduqués, ils régressent aux stades quasi animal. 

 

Le final renvoi directement à un autre classique de l’horreur et de l’épouvante, LA NUIT DES MORTS VIVANTS de George Romero. Le Dr saint luc, seul rescapé fait face à une horde de contaminé qui réagissent comme des zombies, la démarche lente et poussant des râles sinistres.  Cronenberg nous rapelle le classique de Romero pour nous donner,semble t il,  une seconde vision de l'etre humain qui regresse à ses instincts les plus primaires: se nourrir pour Romero, copuler pour Cronenberg.

Ici pas de résolution final, l’heure est venu de contaminé (ou guérir) le reste du monde.

 

Cronenberg, déjà adulé à juste titre par de nombreux fans, ne peut être à cette époque qu’affilié à la mouvance underground et contestataire dont ce premier film est inextricable dans l’esprit.

SHIVERS peut paraître à plusieurs reprises maladroit dans sa mise en scène, Cronenberg hésitant dans ses cadrages et sa façon de gérer l’espace (il apprenait véritablement sur le tas) il ne bénéficiait que d'un maigre budget de 180 000$ canadien et de quinze jours de tournage.

 

Malgré cela, SHIVERS reste un bel essai pour un cinéaste qui n’a toujours pas fini d’aborder ses thèmes de prédilections.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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